L'article 6 §3 : le droit de ne pas s'auto-incriminer

Faits et griefs sur l'article 6 §3

Dans l'affaire Lalik c. Polognen du 11 mai 2023, qui porte sur une violation alléguée de l'article 6 § 3 c) de la Convention européenne des droits de l'homme, garantissant le droit à l'assistance d'un avocat de son choix lors de procédures pénales, la Cour européenne des droits de l'homme a examiné si les droits de la défense du requérant avaient été respectés et si l'utilisation de preuves obtenues en violation de ces droits avait compromis l'équité du procès.

 


Dans cette affaire, le requérant, Przemysław Lalik, a été accusé d'avoir mis le feu à la veste de son compagnon de boisson, causant de graves brûlures et entraînant sa mort. Les juridictions nationales ont reconnu M. Lalik coupable de meurtre aggravé et l'ont condamné à 25 ans de réclusion. Les jugements des tribunaux se sont appuyés sur des déclarations faites par M. Lalik lors de son interrogatoire informel, qui a eu lieu avant qu'il ait pu consulter un avocat et, prétendument, alors qu'il était encore sous l'effet de l'alcool.

 

 

 

L'utilisation de preuves obtenues en violation des droits de la défense porté atteinte à l'équité du procès

La Cour européenne des droits de l'homme a constaté que M. Lalik n'avait pas été correctement informé de ses droits de défense. Il n'était pas certain qu'au moment de son arrestation, M. Lalik avait été informé de son droit de garder le silence, de son droit de ne pas s'auto-incriminer et de son droit de consulter un avocat. De plus, il n'avait pas reçu ces informations avant d'être interrogé de manière informelle, et son taux d'alcoolémie n'avait pas été vérifié à nouveau. La Cour a souligné que le fait de ne pas informer le requérant de ses droits et de procéder à un interrogatoire informel sans la présence d'un avocat l'a placé dans une position défavorable dès le début de l'enquête.

 

La Cour a exprimé sa préoccupation quant à l'admission et à l'évaluation par les juridictions nationales d'éléments de preuve obtenus en violation des garanties fondamentales du droit à un avocat. Les déclarations faites par M. Lalik lors de son interrogatoire informel ont été utilisées comme preuve clé pour établir son intention de tuer son ami, ce qui a conduit à sa condamnation pour meurtre. La Cour a jugé que l'utilisation de ces déclarations avait eu un impact significatif sur le déroulement de l'enquête et les conclusions des tribunaux. Elle a souligné que même si le Code de procédure pénale polonais ne prohibe pas l'utilisation de déclarations spontanées faites lors de l'arrestation, les déclarations en question n'étaient pas réellement spontanées, étant donné qu'elles avaient été faites au cours d'un interrogatoire prolongé en présence de trois policiers et avaient été consignées dans une note officielle.

 

La Cour européenne des droits de l'homme a rappelé que le droit à l'assistance d'un avocat est une garantie essentielle pour assurer l'équité des procédures pénales. Elle a développé une jurisprudence solide en la matière, établissant des normes et des critères pour évaluer si ce droit a été respecté.

 

Selon la jurisprudence de la Cour, le droit à un avocat implique le droit d'être informé de ce droit de manière claire et compréhensible. L'information doit être donnée dès le stade de l'interrogatoire ou de la privation de liberté afin de permettre à l'accusé de bénéficier pleinement de son droit à une défense effective.

 

De plus, la Cour a précisé que l'accès à un avocat doit être réel et effectif, ce qui signifie que l'avocat doit avoir la possibilité de jouer un rôle actif dans la défense de l'accusé. Cela comprend le droit de rencontrer l'accusé en privé, de participer aux interrogatoires et d'être présent lors des moments critiques de la procédure. Dans l'affaire Lalik v. Pologne, la Cour a constaté que les droits de la défense de M. Lalik n'avaient pas été respectés. Il n'avait pas été correctement informé de ses droits, n'avait pas eu accès à un avocat avant un interrogatoire informel de plusieurs heures et les déclarations qu'il avait faites lors de cet interrogatoire ont été utilisées comme preuve clé pour établir sa culpabilité.

 

La Cour a souligné l'importance de garantir la pleine jouissance du droit à un

avocat dès le début de la procédure pénale. Elle a rappelé que l'absence d'un accès effectif à un avocat peut compromettre sérieusement l'équité du procès, car cela peut entraîner des violations du droit de ne pas s'auto-incriminer et du droit à un procès équitable.

 

En concluant à une violation de l'article 6 § 3 c) de la Convention européenne des droits de l'homme, la Cour a affirmé que l'utilisation de preuves obtenues en violation des droits de la défense du requérant avait porté atteinte à l'équité du procès et a rendu la procédure pénale dans son ensemble non équitable.

 

 

Cette affaire vient s'ajouter à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur le droit à un avocat, confirmant l'importance de garantir un accès réel et effectif à un avocat dès les premières étapes de la procédure pénale afin de protéger les droits fondamentaux de l'accusé et d'assurer l'équité des procès.