La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : peine de mort

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : Peine de mort et traitement inhumain

M. Jens Soering, ressortissant allemand, était détenu en Angleterre en attendant son extradition vers les États-Unis où il devait répondre d’accusations d’assassinat.

 

Il se plaignait qu’il risquait de se voir condamner à la peine capitale s’il était extradé.

 

Il craignait également de subir un traitement inhumain et dégradant contraire à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, compte tenu de ce que les détenus condamnés passent plusieurs années dans des conditions de tension extrême et de traumatisme psychologique dans l’attente d’être exécutés.

 

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a conclu qu’une extradition vers les États-Unis exposerait l’intéressé à un risque réel de traitement contraire à l’article 3.

 

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a estimé que le but légitime de l’extradition pouvait être atteint par d’autres moyens, sans entraîner pour autant des souffrances d’une intensité ou durée exceptionnelles.

 

Par conséquent, elle a conclu que la décision d’extrader M. Soering vers les États-Unis violerait l’article 3 si elle recevait exécution.

 

Cour européenne des droits de l’Homme, 07.07.1989, Soering c. Royaume-Uni (requête no 14038/88)

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : Risque d’être condamné à la peine capitale

M. Bader faisait l’objet d’arrêtés d’expulsion vers la Syrie et alléguait qu’ayant été condamné par défaut pour complicité de meurtre à la peine capitale en Syrie, il courait un risque réel d’être exécuté s’il y était renvoyé.

 

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a estimé qu'il était fondé à craindre que la peine de mort fût exécutée en cas de retour dans ce pays car la peine capitale y était appliquée en dehors de tout contrôle du public et sans que personne ne doive en rendre compte

 

En ce qui concerne la procédure à l’issue de laquelle la peine capitale avait été prononcée, la Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a estimé qu'elle se caractérisait par sa nature sommaire et la négation totale des droits de la défense, déni flagrant de procès équitable.

 

Par conséquent, la Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a dit que la mesure d’expulsion de M. Bader et de sa famille vers la Syrie, si elle recevait application, emporterait violation des articles 2 et 3 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales.

 

Cour européenne des droits de l’Homme, 08.11.2005, Bader et Kanbor c. Suède (requête no 13284/04)

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : Risque de se voir infliger la mort par lapidation

Mme Jabari, ressortissante iranienne, a fuit l’Iran où elle avait été placée en garde à vue pour avoir eu une relation avec un homme marié.

 

Arrêtée à Istanbul en raison d’un faux passeport canadien, elle allégua qu’elle courait un risque réel de se voir infliger la peine de mort par lapidation si elle était expulsée.

 

La CEDH jugea que la décision d’expulser l’intéressée vers l’Iran violerait l’article 3 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales si elle était mise à exécution.

 

Cour européenne des droits de l’Homme, 11.10.2000, Jabari c. Turquie (requête no 40035/98)

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : Peine capitale et procès inéquitable

Abdullah Öcalan purge une peine de réclusion à perpétuité dans une prison turque après qu'il fut condamné à la peine capitale en juin 1999 et que l’abolition en août 2002 de la peine capitale en temps de paix eut amené la cour de sûreté de l’État d’Ankara à commuer sa peine en réclusion à perpétuité.

 

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a d'abord conclu à la non-violation des articles 2, 3 et 14 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales car la peine de mort avait été abolie et M. Öcalan avait vu sa peine commuée en réclusion à perpétuité.

 

Puis, la La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a relevé que la peine de mort en temps de paix était considérée en Europe comme une forme de sanction inacceptable, qui n’est plus autorisée par l’article 2.

 

De plus, la La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a jugé qu’il serait contraire à la Convention, même si l’article 2 devait être interprété comme autorisant toujours la peine de mort, d’exécuter une telle peine à l’issue d’un procès inéquitable.

 

Ainsi, la peur et l’incertitude quant à l’avenir engendrées par une sentence de mort, dans des circonstances où il existe une possibilité réelle que la peine soit exécutée, sont sources d’une angoisse considérable chez l’intéressé.

 

Pour M. Öcalan, la Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) a relevé qu’il y avait un moratoire sur l’exécution de la peine de mort en Turquie depuis 1984 mais que M. Öcalan ayant été la personne la plus recherchée de Turquie, le risque que la sentence fût appliquée a été réel pendant plus de trois ans, jusqu'à la décision d’abolir la peine de mort.

 

Par conséquent, le fait de prononcer la peine de mort à l’issue d’un procès inéquitable, devant un tribunal dont l’indépendance et l’impartialité étaient sujettes à caution, s’analysait en un traitement inhumain contraire à l’article 3 de la Convention.

 

Cour européenne des droits de l’Homme, 12.05.2005, Öcalan c. Turquie (requête no 46221/99)

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) : La peine capitale contraire en tant que telle à la Convention

Deux ressortissants irakiens de confession sunnite, accusés de participation au meurtre de deux soldats britanniques en Irak en 2003, furent remis aux autorités irakiennes par les autorités britanniques, les exposant à un risque réel de subir la mort par pendaison.

 

Lorsque la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales a été rédigée, la peine de mort n’était pas considérée comme contraire aux normes internationales mais il y a eu depuis une évolution vers l’abolition complète de facto et de jure de la peine de mort dans les 47 États membres du Conseil de l’Europe et deux Protocoles à la Convention abolissent la peine de mort, l’un l’abolissant en temps de paix (Protocole no 6) et l’autre de manière universelle (Protocole no 13).

 

Pour la Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.), l’article 2 a donc été modifié de telle manière qu’il interdit la peine capitale en toutes les circonstances et la CEDH dit que la peine de mort, qui implique un certain degré de douleur physique et suscite chez le condamné une intense souffrance psychique du fait qu’il sait que l’État va lui donner la mort, peut passer pour inhumaine et dégradante et, en tant que telle, pour contraire à l’article 3 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales.

 

Cour européenne des droits de l’Homme, 02.03.2010 Al-Saadoon et Mufdhi c. Royaume-Uni (requête no 61498/08)