Cour européenne des droits de l’Homme

Sanction de l'inefficacité de la procédure engagée pour l'indemnisation de dommages médicaux

Faits : Responsabilité médicale reconnue mais médecin insolvable

Mme Elvira Codarcea est citoyenne roumaine et avocate. Le 4 juin 1996 elle fut admise à l’hôpital pour des interventions vénielles. Le Docteur B. lui recommanda aussi une intervention de chirurgie plastique et pratiqua une blépharoplastie (correction des paupières).

 

Suite à cette blépharoplastie, ses paupières ne se fermaient plus et Mme Codarcea dût être hospitalisée et opérée une deuxième fois, puis une troisième fois. Ces opérations lui causèrent une parésie faciale du côté droit et d’autres séquelles, y compris un syndrome neurasthénique-dépressif, nécessitant un traitement médical spécialisé. Plusieurs interventions chirurgicales ultérieures furent nécessaires.

 

Le 5 juin 1998, Mme Codarcea porta plainte avec constitution de partie civile contre le Docteur B. mais l’action pénale demeura infructueuse et fut définitivement classée pour prescription pénale.

 

La même année elle intenta une action civile en responsabilité contre le Docteur B. et l’hôpital où elle avait été opérée. Le juge civil condamna le médecin au paiement de dommages intérêts mais débouta la requérante de son action contre l’hôpital, jugeant que ce-dernier ne pouvait pas être tenu responsable des actes accomplis par le médecin.

 

Une procédure d’exécution forcée a été ouverte contre le Docteur B. mais demeura infructueuse pour cause d’insolvabilité du médecin.

 

Sur le terrain de l’article 8, la requérante considère que l’inefficacité de la procédure l’a empêchée d’obtenir une juste réparation de ces préjudices physiques et moraux.

 

 

Solution : obligation d'une réparation effective quand la responsabilité médicale est reconnue

Dans son arrêt du 2 juin 2009, CODARCEA c. ROUMANIE, la Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) rappelle que les questions liées à l’intégrité physique et morale des personnes ainsi qu’à leur consentement aux actes médicaux qui leur sont prodigués entrent dans le champ d’application de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme.

 

La Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) souligne que les Etats ont l’obligation d'imposer aux hôpitaux, publics ou privés, l’adoption de mesures propres à assurer le respect de l’intégrité physique de leurs patients et que tout patient doit être informé des conséquences d’une intervention médicale pour pouvoir y consentir valablement.

 

A défaut, lorsque l’intervention a lieu dans le cadre d’un hôpital public, les Etats peuvent être tenus directement responsables.

 

En l’espèce, si Mme Codarcea a bien eu accès à une procédure qui lui a permis de faire reconnaître la responsabilité du médecin, la somme allouée n’a jamais pu être recouvrée en raison de l’insolvabilité du médecin et de l’absence d’un mécanisme d’assurance pour responsabilité médicale.

 

La  Cour européenne des droits de l'Homme (C.E.D.H.) observe aussi que les juridictions roumaines ont refusé de reconnaître la responsabilité de l’hôpital.

 

Il y a donc violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme en raison de l’impossibilité pour la requérante d’obtenir la réparation qui lui a été reconnue par une décision de justice pour les conséquences de la faute médicale dont elle a été victime.