Durcissement des conditions pour saisir la Cour européenne des droits de l'Homme
A partir du 1er janvier 2014, le nouvel article 47 du règlement de la CEDH impose de respecter des conditions de formes plus strictes pour saisir la Cour.
Premier changement : toute requête incomplète sera rejetée sans préavis par la CEDH
A partir du 1er janvier 2014, toute requête incomplète (ou considérée comme telle) sera désormais rejetée par la Cour sans information préalable.
Jusqu'à présent, le Greffe sollicitait du requérant (ou de son avocat) les pièces manquantes ou les informations oubliées (exemples courants : mention du lieu de naissance du requérant, absence du pouvoir de représentation, absence des conclusions du rapporteur public...)
C'est désormais terminé : tout formulaire envoyé à la CEDH devra être immédiatement, et correctement rempli, et accompagné des copies des documents pertinents, sous peine de rejet sans préavis.
Bien évidemment, ce rejet ne sera pas motivé autrement que par une mention lapidaire du non-respect des conditions de l'article 47 du Réglement de la Cour.
Donc, l'impression d''arbitraire sera grande pour qui recevra une telle décision, mais de surcroît il lui sera très difficile, même si les délais ne sont pas échus, de présenter une nouvelle requête cette fois-ci corrigée.
En effet, sans indication de ce qui péchait avec la première requête il sera compliqué de la corriger.
Sans compter qu'il sera impossible désormais de détromper le Greffe, en lui indiquant courtoisement qu'il s'est mépris, or il lui arrive fréquemment de se tromper, ce qui est normal au vu de sa charge de travail et de l'instabilité de ses effectifs.
Pour l'avocat souhaitant saisir la CEDH, le risque de devoir remplir une déclaration de sinistre n'est donc plus à prendre à la légère.
En effet, comment éviter de paraître incompétent face à son client si le Greffe répond lapidairement que le dossier est irrecevable pour des raisons de forme, sans préciser lesquels, mais en invitant par un paragraphe spécialement dédié le requérant, respectivement son avocat, à se documenter sur la façon de remplir correctement une requête ?
Car c'est bel et bien ainsi que se terminent, du moins jusqu'à ce jour, les lettres-type de rejet pour méconnaissance de l'article 47 du réglement de la Cour... in cauda venenum...
Second changement : absence d'interruption du délai de 6 mois
A partir du 1er janvier 2014, pour "interrompre" le délai dans lequel la CEDH doit être saisie ( rappel : dans les 6 mois suivant la dernière décision définitive interne pertinente), il faut dorénavant que la requête remplisse immédiatement et parfaitement toutes les conditions énumérées à l’article 47 du règlement de la Cour.
Il faudra donc présenter du premier coup un dossier complet pour "interrompre" le délai de 6 mois.
En pratique, cela veut dire que le courrier LRAR sur papier libre par lequel le requérant (ou son avocat) informe la CEDH de son intention de la saisir et sollicite l'envoi du formulaire de requête à compléter ne permet plus d'interrompre le délai.
C'est la date de réception par la CEDH, dans un second temps, du formulaire de requête intégralement et correctement rempli, avec la copie de toutes les annexes pertinentes, qui sera seule prise en compte pour déterminer le respect du délai.
Cela revient à dire qu'il est désomais impossible d'interrompre le délai le 6 mois : soit on le respecte en présentant une requête formellement parfaite dans les temps, soit on ne le respecte pas en ne présentant pas une requête formellement parfaite dans les temps, mais on ne peut plus interrompre le délai stricto sensu en sollicitant quelques semaines de grâce pour permettre de recevoir et de renseigner la requête.
Cela signifie également que le requérant ou son avocat peuvent désormais être piégés par l'absence de réactivité de la CEDH : si le Greffe tarde à répondre au courrier introductif qui sollicite l'envoi du formulaire papier, le délai peut très bien arriver à échéance dans l'intervalle. Or, un délai de 3 à 6 semaines avant de recevoir la réponse de la Cour n'est pas inhabituel.
Il sera donc vivement conseillé de ne pas attendre cette communication du formulaire de requête par le Greffe, mais de télécharger directement le formulaire de requête sur le site de la Cour européenne des droits de l'Homme et de l'imprimer pour le renseigner immédiatement.