Être condamné pénalement simplement pour avoir refusé d’être inscrit au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAE) est contraire au droit au respect de la vie privée
Aycaguer contre France - 22 juin 2017 - no 8806/12
Voir aussi le communiqué du Greffier de la Cour, CEDH 215 (2017) 22.06.2017
L’affaire concerne le refus de se prêter à un prélèvement biologique destiné à un
enregistrement dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG).
Le 24 décembre 2008, le requérant, un citoyen français du nom d'Aycaguer qui s'était vu reproché des violences en marges d'une manifestation d'agriculteurs, a été convoqué par le Parquet pour un prélèvement biologique sur sa personne (sur le fondement des articles 706-55 et 706-56 du Code de procédure pénal)
M. Aycaguer a refusé ce prélèvement.En droit français, refuser ce prélèvement est constitutif d'un délit.
Le 19 mai 2009, M. Aycager fut donc convoqué devant le Tribunal correctionnel pour avoir refusé ce prélèvement.
Le 27 octobre 2009, le Tribunal de Bayonne le condamna à une peine d’amende de 500 euros, que la Cour d’appel de Pau confirma.
M. Aycaguer forma un pourvoi en cassation qui fut rejeté
La Cour européenne des droits de l'Homme a d'abord observé que le Conseil constitutionnel avait décidé, le 16 septembre 2010, que les dispositions relatives au FNAEG étaient conformes à la Constitution, mais sous réserve « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ».
La Cour européenne des droits de l'Homme a ensuite noté que cette réserve n’a pas reçu de suite appropriée et qu’aucune différenciation n’était actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité des infractions commises.
La Cour européenne des droits de l'Homme a jugé enfin que le régime de conservation des profils ADN dans le FNAEG n’offrait pas, en raison de sa durée et de l’absence de possibilité d’effacement,
de protection suffisante aux intéressés, ce qui rompt le principe de juste équilibre entre les intérêts publics et privés en jeu.
La Cour européenne des droits de l'Homme en a conclut que la France a outrepassé sa marge d’appréciation en la matière, la condamnation pénale de M. Aycaguer pour avoir refusé de se soumettre au prélèvement biologique destiné à l’enregistrement de son profil dans le FNAEG s’analyse en une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique.
Il y a donc eu violation de l’article 8 de la Convention.